Évangile de Marc - tombeau et Marie

Le soir de ce même dimanche, les disciples sont réunis dans une maison. Ils ont fermé les portes à clé parce qu’ils ont peur des chefs juifs. Jésus vient et se tient au milieu d’eux. Il leur dit : « La paix soit avec vous ! »
Quand Jésus est venu dans la maison, Thomas appelé le Jumeau, l’un des douze apôtres, n’était pas avec eux.
[…]
Ensuite il dit à Thomas : « Avance ton doigt ici et regarde mes mains. Avance ta main et mets-la dans mon côté. Arrête de douter et crois. » 
Thomas lui répond : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » 

Jean 20 :19-28

Thomas

Avant de conclure, je vous propose de nous arrêter, au cours de ce cheminement, sur le comportement de Thomas, le disciple « qui n’était pas avec eux ».

Traiter quelqu’un de Saint-Thomas, en général, ce n’est pas un compliment. Thomas, c’est le mécréant, l’agnostique, Thomas c’est celui qui n’a pas confiance, qui ne croit que ce qu’il voit…

L’absence de Thomas

Thomas n’était pas là. Beaucoup de conjectures ont été émises pour expliquer son absence, là-dessus, les exégètes s’en sont donnés à cœur joie. Ce qui est curieux, d’ailleurs, c’est que les commentaires s’attachent à l’aspect « historique » de cette précision – que faisait Thomas, pourquoi était-il absent, où était-il ? –  et non à sa signification théologique. Néanmoins, voici quelques hypothèses, prises au hasard :

  • s’il n’était pas là, c’est qu’il n’était pas encore revenu de la fuite, de la débandade qui a suivi la mort du Christ ; il était parti plus loin que les autres – ce qui prouve qu’il avait plus peur que les autres – et il n’était pas encore revenu
  • on a dit aussi qu’il avait été agacé par les récits des femmes, et qu’il était parti pour y échapper !
  • une autre hypothèse me convient bien, elle peut faire réfléchir – la Bible est faite pour cela . Si les disciples s’enfermaient par peur des chefs juifs et que Thomas n’était pas avec eux, c’est parce que lui n’avait pas peur. Et qu’il était déjà en train de faire son travail de disciple, c’est-à-dire d’annoncer la Parole au-dehors, comme Jésus le leur avait enseigné

Le jumeau

Des hypothèses, il y en a certainement eu d’autres et, comme je dis souvent : pourquoi pas ?

Seulement, quand on veut comprendre un texte, il ne faut pas trop se lancer dans la créativité, il faut se demander quelle était l’intention de l’auteur en racontant tel ou tel détail. Pourquoi l’évangéliste signale-t-il – ou invente-t-il – cette histoire d’absence de Thomas, détail que ni Luc ni Matthieu ne relèvent. Pour moi, la question est là. Pourquoi Jean, en écrivant son évangile, a-t-il donné cette précision ? Est-ce que c’est pour placer son célèbre « heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru » ? Non, parce que Thomas n’avait pas besoin d’être absent pour montrer son incrédulité. Et d’ailleurs, il n’est pas le seul disciple à avoir du mal à croire ce qui se passait, loin de là.

En ce qui me concerne, je crois que l’évangéliste savait parfaitement ce qu’il faisait en ajoutant ce détail. Il voulait montrer un des disciples comme un homme de caractère, qui n’est pas disposé à croire n’importe quoi à la légère. Et sans entrer dans l’onomastique – la signification des noms – Jean nous donne un indice : Thomas est appelé « le jumeau », deux personnes en une, l’une qui croit et qui le montre en suivant le Christ, l’autre qui doute et qui veut comprendre.

Mon Seigneur et mon Dieu

Toujours à propos de Thomas, il y a un autre verset qui a son importance, le verset 28, « Mon seigneur et mon Dieu ». Je crois que c’est la première fois dans l’évangile qu’on semble dire la divinité de Jésus, et d’ailleurs cette exclamation de Thomas a été largement utilisée par la grande Église au cours des siècles.

Certains ont pu dire, mais ils ont été immédiatement frappés d’anathème au IVe siècle, que Thomas disait « mon Dieu ! » parce qu’il était ébloui par le prodige ! Mais la réalité, c’est que Jean a bel et bien inséré cette hypothèse : Jésus est Dieu. Et je pense que, déjà au début du IIe siècle, l’idée de la double nature de Jésus, humaine et divine, se faisait jour et gagnait peu à peu du terrain. L’idée était véhiculée dans les grandes cités où le christianisme était bien implanté et elle était théorisée par de grands auteurs, postérieurs à Jean mais qui le suivaient de près, Ignace d’Antioche, Tertullien, etc.

Bien entendu, je ne me prononcerai pas sur le thème de la divinité de Jésus, ce serait bien imprudent de ma part !

2 commentaires

  1. Je n’avais jamais pensé que Thomas pouvait être moins craintif etc. ni pourquoi Jean disait cela. Merci d’aiguiser nos yeux et nos esprits endormis par l’habitude !

  2. Pour Jean Alexandre, dans son livre récent :Dieu et son aide, « le Christ est le Dire de Dieu dans notre monde. Je me réfère à un élément de la jurisprudence juive de l’époque : « Celui que quelqu’un envoie pour parler en son nom est comme un autre lui-même. » C’est dans ce sens que Jésus devint « comme Dieu » pour les gens qui ont eu foi en lui, et qu’il fut nommé Fils puisque … c’est le fils qu’on envoie en premier lieu pour tenir lieu de son père. » C’est ce que Thomas a perçu en voyant le Ressuscité, cette identité profonde entre le Père et le Fils.

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