Bible Limoges

L’Ancien Testament

La préhistoire

Une période qui n’a pas produit de documents

On appelle ainsi une période n’ayant pas produit de textes ou de documents qui soient parvenus jusqu’à nous. En Palestine, aucun texte hébreu ne nous est parvenu datant d’avant l’an 800. Certes, d’autres peuples voisins ont écrit auparavant :

La Babylonie pratiquait couramment, dès le IIIe millénaire, les caractères cunéiformes. Ces caractères, non encore alphabétiques, sont gravés comme par des clous, sur des tablettes d’argile.

L’Égypte a produit de très nombreux textes en hiéroglyphes. Pourtant aucun d’eux ne mentionne le peuple hébreu ni Joseph, ni Moïse, ni aucun autre de ses personnages. Tout au plus trouve-t-on dans une liste de peuples vaincus le nom des « Hapirous » qui pourrait peut-être désigner les Hébreux. Mais on ne peut évidemment en être sûr, et cela ne donne aucun renseignement sur eux.

La civilisation d’Ougarit, l’actuelle Ras-Shamra, nous a laissé de nombreux textes, économiques, diplomatiques, religieux (culte de Baal), datant de 1500 à 1100 av. J.-C.
A cette époque de l’âge du bronze on est encore loin de voir apparaître le monde israélite ; celui-ci surgira à l’âge du fer, lorsque Ougarit aura disparu de la scène de l’histoire : Une inscription araméenne datant de cette période a été découverte au Tell Dan en Galilée en 1993 ; elle est fragmentaire et peu claire ; elle cite « la maison de David », ce qui pourrait être la 1ère mention historique de la dynastie du roi David.
Ce n’est pas une certitude car l’écriture de l’époque ne mentionnait pas les voyelles et il pourrait s’agir du temple (la maison) d’une divinité locale nommée Daud. Cette stèle mentionne par ailleurs des batailles du IXe siècle et date donc de 150 ou 200 ans après l’époque du roi David.

La stèle de Mesha

Le premier texte non biblique établissant une relation avec un récit biblique est le texte de la stèle de Mesha, conservée au Louvre et qui est datée de 850 – 830 avant JC. Ce qu’elle rapporte est écrit en 2 Rois 3.

Un autre texte ancien non biblique établissant une relation avec un récit biblique (2 Rois 20. 20) date de la fin du VIIIe siècle. Il raconte qu’à cette époque, sur ordre du roi Ezéchias, un tunnel a été creusé sous Jérusalem dans le but d’assurer l’approvisionnement en eau de la ville en cas de siège. L’inscription en hébreu est l’une des plus anciennes dans cette langue. Elle commémore le moment où les deux équipes qui creusaient à chaque extrémité font leur jonction :

Terminé est le forage.
Et voici comment se passa le forage.
Lorsqu’il ne resta que trois coudées à abattre,
on entendit la voix de chacun appelant l’autre
car il y avait de l’ardeur au travail,
à l’intérieur du rocher à droite et à gauche.
Au jour du forage,
les mineurs frappèrent l’un à la rencontre de l’autre,
pic contre pic
et allèrent les eaux depuis l’issue jusqu’au réservoir
sur 1200 coudées
et de cent coudées était la hauteur du rocher
au-dessus de la tête des mineurs.

Mais l’intérêt de cette inscription – qui a été déposée au musée d’Istanbul – tient aussi au fait qu’elle a été découverte à Jérusalem même et que le tunnel de Siloé existe toujours.

Appartiennent donc à la période préhistorique ou protohistorique les épisodes suivants. Ils ne relèvent pas de la science historique qui ne peut rien en dire.

– Adam et Eve, Caïn et Abel, Noé, la tour de Babel, Abraham, Isaac et Jacob.
– Moïse, l’exode hors d’Égypte, la mer Rouge, la manne, l’eau du rocher, la bataille contre Amalek, le mont Sinaï et les dix commandements.
– Le passage du Jourdain, Jéricho et la conquête de Canaan.
– Débora, Gédéon, Samson, etc.

Xe et IXe siècles – période royale

Les rois David et Salomon règnent à Jérusalem, sans que l’on puisse connaître ni leurs dates précises, ni aucun événement qui relèverait de la précision historique.

Il y a deux royaumes  indépendants, le plus puissant, Israël au nord (futures Galilée et Samarie) et le plus petit, Juda au sud autour de Jérusalem, la future Judée. l’Assyrie envahira Israël, et déportera sa population en 721 av. JC. Les habitants demeurant au sud du pays se réfugieront en Juda et y apporteront certaines de leurs traditions (comme les cycles d’Elie-Elisée). La population du petit Royaume de Juda augmentera ainsi considérablement. La ville de Jérusalem notamment triplera ses dimensions.
Plus tard, au 7e siècle av. JC, sous le grand roi Josias, se développera la construction idéologique d’une grande Monarchie Unifiée ayant existé jadis autour du roi David sur tout le « peuple d’Israël », Nord et Sud unifiés, centrée sur Jérusalem et son Temple.

La disparition du roi et du Temple lors de l’Exil du VIe siècle sera ressentie de façon dramatique.

On pensait récemment encore que les textes dits « Yahvistes » dont nous parlerons à propos du VIe siècle, avaient été rédigés au Xe siècle. On ne le pense plus, généralement, aujourd’hui.

VIIIe siècle avant Jésus-Christ

À la fin du siècle, en 721, la puissante Assyrie a vaincu et détruit Israël du Nord, et déporté sa population. Les tribus du nord disparaîtront alors en tant que telles. Aucun penseur n’a élaboré de pensée théologique et religieuse. Ils n’ont donc pas pu perpétuer dans l’Exil leur identité religieuse comme ce sera le cas au VIe siècle pour le royaume de Juda exilé à Babylone.

Le VIIIe siècle est le siècle des grands prophètes : Ésaïe (chapitres 1 à 39), Michée à Jérusalem, Amos, Osée, en Israël du Nord. Les prophètes Elie et Elisée n’ont pas écrit et les deux livres des Rois rapportent ces cycles.

Les prophètes

Ils ne mentionnent jamais les événements fondateurs rapportés dans la Genèse et l’Exode : Adam et Ève, Noé, les Patriarches, la sortie d’Égypte avec Moïse, le don de la Loi au Sinaï, les quarante ans au désert. Personne n’a encore élaboré d’histoire du salut.

On remarquera notamment dans leurs livres :

  • l’absence du cycle deutéronomiste : alliance – désobéissance – châtiment – repentance – salut.
  • l’absence de l’idée que la sortie d’Égypte est fondatrice de l’identité du Peuple.
  • l’absence de la promesse d’une descendance nombreuse et du don de la terre d’Israël.

Quelques mentions en apparaissent seulement, sans que leur importance soit marquée :

Ainsi parle l’Éternel à la maison de Jacob, lui qui a racheté Abraham : maintenant Jacob n’aura plus honte, son visage ne pâlira plus.

Esaïe 29 :22

Caractérisons ainsi les prophètes du VIIIe siècle :

1/ ce sont de puissantes personnalités ayant une relation forte avec Dieu. Les récits de leur vocation en témoignent.

L’année de la mort du roi Ozias, je vis le Seigneur assis sur un trône très élevé, et les pans de sa robe remplissaient le temple. Des séraphins se tenaient au-dessus de lui ; ils avaient chacun six ailes ; deux dont ils se couvraient la face, deux dont ils se couvraient les pieds, et deux dont ils se servaient pour voler.
Ils criaient l’un à l’autre, et disaient :
– Saint, saint, saint est l’Éternel des armées ! toute la terre est pleine de sa gloire !
Les portes furent ébranlées dans leurs fondements par la voix qui retentissait, et la maison se remplit de fumée.
Alors je dis :
– Malheur à moi ! je suis perdu, car je suis un homme dont les lèvres sont impures, j’habite au milieu d’un peuple dont les lèvres sont impures, et mes yeux ont vu le Roi, l’Éternel des armées.
Mais l’un des séraphins vola vers moi, tenant à la main une pierre ardente, qu’il avait prise sur l’autel avec des pincettes. Il en toucha ma bouche, et dit :
– Ceci a touché tes lèvres ; ton iniquité est enlevée, et ton péché est expié.
J’entendis la voix du Seigneur, disant :
– Qui enverrai-je, et qui marchera pour nous ?
Je répondis :
– Me voici, envoie-moi.

Esaïe :6

2/ conviction de la présence secrète de Dieu dans le cours de l’histoire. Affirmation du calme que procure la foi en sa présence.

3/ dénonciation de l’orgueil du peuple, de son idolâtrie et notamment du culte de Baal

Si vous ne tenez pas ferme vous ne serez pas affermis

Esaïe 7 :9

L’actualisation de leurs textes est possible et heureuse pour nous aujourd’hui. Leur message semble convenir particulièrement à notre époque où l’on conçoit volontiers, comme eux, une Présence divine universelle, faisant surgir des réalités nouvelles et inattendues du chaos ; dynamisme cosmique qui n’est pas lié, comme dans les théologies des VIIe et VIe siècles à un peuple particulier (ou une Église), à sa fidélité, à un système dogmatique élaboré.
A cette époque où le monothéisme n’est pas encore clairement affirmé, la doctrine de Dieu est, alors, davantage celle d’un champ d’énergie dynamique que celle d’un satellite espion…